Une pépinière de jeune talent

Capitale de préfecture éponyme, Shizuoka est une agréable cité balnéaire de 700 000 habitants au pied du mont Fuji et à deux heures de route de Tokyo. Réputée pour ses plantations de thé – la région accueillerait à elle seule 50% de la production nationale – la ville abrite également un jeune pépiniériste d’un genre nouveau : Naruoka Suichi, qui s’est lancé en 2012 dans l’importation d’oliviers d’ornementation à la sauce bonsaï. Entretien.

Ces oliviers espagnols ont plus de 100 ans et ont subi une petite coupe bonsaï – (c) In Olio Veritas

In Olio Veritas – Naruoka Suichi, bonjour. Pouvez-vous nous décrire en quelques mots votre activité ?

Naruoka Suichi – Je suis un pépiniériste spécialisé dans l’olivier, mais à des buts de décoration et ornementation, pas pour l’horticulture. J’importe des oliviers d’Espagne, et les vends ici à des particuliers aussi bien qu’à des professionnels, principalement dans la région de Tokyo et Yokohama (ndlr : deuxième ville du Japon et voisine de Tokyo), mais aussi ailleurs dans le pays. Voyez ce hojiblanca centenaire par exemple : je dois le livrer la semaine prochaine à un restaurateur espagnol d’Osaka. Les oliviers que je commercialise sont d’un genre particulier puisque les branches et les racines sont taillées façon bonsaï, pour plaire au public local… et s’adapter au manque d’espace dans les villes japonaises. Certains arbres ont quelques dizaines d’années, d’autres sont centenaires, et le chef d’œuvre de la collection actuelle a plus de 700 ans !

L’olivier du XIVè siècle trône au milieu de congénères tout juste centenaires – (c) In Olio Veritas

In Olio Veritas : Comment vous est venue l’idée et comment vous êtes vous formé à ce métier ?

Naruoka Suichi : L’olivier est un arbre qui me fascine depuis longtemps et j’ai souhaité en faire mon métier. Toutefois je ne voulais pas le cultiver pour en faire de l’huile. Ce qui m’intéressait avant tout était de pouvoir le dessiner ou plus exactement le redessiner, en bonsaï donc. Je me suis formé tout seul, en lisant de nombreux manuels spécialisés, que ce soit sur les oliviers ou la technique bonsaï. Le plus important c’est la taille perpétuelle des branches et des feuilles, tout en veillant à ce que l’arbre reçoive tout de même un peu de lumière. Je me suis lancé en 2012 : mon père tenait depuis déjà de nombreuses années une pâtisserie ainsi qu’un salon de thé attenant, et je lui ai subtilisé ses places de parking pour en faire la vitrine à ciel ouvert de ma pépinière.

Naruoka père, pâtissier incroyablement doué et plein de bienveillance envers son fils et ses oliviers – (c) In Olio Veritas

In Olio Veritas – Faire venir des arbres de cette taille depuis l’Espagne ne doit pas être une mince affaire. Comment cela fonctionne-t-il ?

Naruoka Suichi – Je me rends régulièrement en Espagne pour choisir les arbres, et négocier le prix. Mon anglais est assez limité, et je ne parle pas espagnol, donc j’utilise les moyens modernes de traduction instantanée, et beaucoup de gestes pour me faire bien comprendre. Ensuite les arbres sont convoyés par cargo jusqu’au Japon, ce qui prend 2 mois en moyenne. Ils voyagent dans des containers à ciel ouvert pour respirer et recevoir de la lumière. À l’arrivée au Japon, les choses se compliquent car les autorités sont très regardantes : si elles estiment qu’un arbre est susceptible de faire entrer sur l’archipel un insecte ou un champignon exogènes, elles ne le laissent pas débarquer.

Mieux que les insecticides : Bera, le magnifique chat-léopard des Naruoka – (c) In Olio Veritas

In Olio Veritas – Question indiscrète : à combien vendez-vous les différents modèles de votre catalogue ?

Naruoka Suichi – Les oliviers centenaires par exemple se vendent aux alentours de 3 500€ pièce. L’olivier de 700 ans a lui un prix de vente de 40 000€ environ, mais c’est évidemment un modèle unique. Cependant, comme je fais également pousser moi-même de jeunes arbres à partir de boutures, et réalise des bonsaïs sur de petits bouts d’écorce, il y en a en réalité pour tous les budgets.

Des modèles plus abordables – (c) In Olio Veritas

In Olio Veritas – Une dernière question : au-delà de votre passion pour l’arbre, avez-vous un attrait pour ses fruits et plus particulièrement l’huile d’olive ?

Naruoka Suichi – Oui bien sûr ! Mon père et moi sommes de grands consommateurs d’huile d’olive ! Nous en mangeons quotidiennement, dès le petit-déjeuner en ce qui concerne mon père, qui en utilise aussi dans certaines de ses pâtisseries. Je suis assez proche de Kenta et Rie que vous allez rencontrer sur leur exploitation d’Enshu Olives et dont j’adore l’huile. Un de mes amis importe par ailleurs de l’huile européenne de qualité pour le marché japonais, et j’aime particulièrement une huile portugaise que je vous ferai déguster. Malheureusement la grande majorité des Japonais aujourd’hui ne sait pas faire la différence entre l’huile de bonne et pauvre qualité.

Longue vie à Suichi et Narushuu Olive ! – (c) In Olio Veritas

Pour en savoir plus :

Pour retrouver tous nos articles sur l’huile d’olive au Japon, c’est par ici.

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